Lecteur assidu de longue date, je sais par expérience qu’on cherche les caricatures, elles plaisent pour deux raisons, outre qu’elles sont brûlantes d’actualité, elles sont d’une drôlerie irrésistible et donc percutantes, ceci dit à ce propos, les légendes sont souvent aussi bien venues que les caricatures mêmes parce qu’il s’agit d’aphorisme à l’emporte-pièce.
N‘ayant pas l’honneur de rencontrer l’écrivain idéal, j’essayais de me le représenter, j’étais certain que mon imagination m’en brossait un portait fidèle, quand j’eus l’occasion de voir les auto caricatures d’autres écrivains, mes doutes se dissipèrent, il est bel et bien de crée la caricature en ton fort intérieur, me dis-je, gai, étincelant d’esprit, plein d’entrain dans ses propos et artiste convaincu, qui est parvenu à ensorceler son crayon au point de le rendre capable de créer spontanément, on devient maître.
Le maître du dessin satirique et de la plaisanterie était devenu l’incarnation même d’une patience à toute épreuve, était-il possible qu’il y eût la quelque chose capable de détruire l’unité traditionnelle entre la vie et l’œuvre de l’artiste ? Ou plus encore l’unité de l’homme et de l’artiste ? N’ai-je pas dit que les dessins qui ressemblaient beaucoup à l’artiste ? Mais que se passe-t-il alors ? En prenant la plume, le peintre avait-il cessé d’être lui-même ?
Tout cela mérite réflexion, mais une chose est certaine, l’artiste fidèle au précepte selon lequel le talent vit de travail, d’un travail souvent plein d’abnégation, le fait est que quels que soient les dons d’un artiste, il se peut qu’au moment où il se met à l’œuvre, il parait de plus en plus se ressembler à lui-même, avec une pointe d’humour, on peut dire que la mesure de son manque de ressemblance à lui-même n’est que la mesure de la conscience, qu’il a de sa responsabilité, même si des années séparent le début de la fin du travail.